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XVIIème Siècle - La guerre de Trente ans


Avant la guerre

 
Avant la guerre de Trente Ans (1618-1648) Chavigny se résume à un village-rue : route de Brabois,chemin de la Vierge, rue des Castors et rue du Haldat. Cette guerre, qui dépeuple la Lorraine, touche durement la population qui connaîtra une véritable extermination. Aussi, l'ouverture de nouvelles routes sera un facteur essentiel de recolonisation de ces campagnes dévastées.

L'arrivée de la guerre

La période de la Guerre de Trente Ans (1618-1648) a été une période noire pour toute l'Europe centrale. La Lorraine, à partir de 1633, et jusque vers 1660 en raison de l'occupation française, a été victime de ses conséquences, et Chavigny n'a pas échappé complètement aux effets terribles de ce conflit, même s'il n'y a jamais eu, comme certains l'avaient cru, de destruction complète ni d'abandon du village.

En 1633, le village de Chavigny, qui compte environ 200 habitants, est encore très prospère. Mais à cette date, la situation s'assombrit tout à coup. C'est d'abord la peste qui sévit, accompagnement inévitable à cette époque des déplacements des troupes.

Ce sont ensuite les exactions des armées, régulières ou irrégulières: le passage répété au cours des opérations militaires des régiments français ou lorrains, des troupes allemandes, suédoises, hongroises et croates, dépouille les habitants d'une grande partie de leurs provisions et de leurs biens. Des famines en résultent, et il n'est pas facile, dans le déclin démographique qui se produit alors en Lorraine, de faire la part de la peste, de la famine, des morts violentes dues à la guerre et de l'émigration vers des contrées plus favorisées. Il ne reste plus à Chavigny, en 1661, qu'une quinzaine de "conduits", contre une quarantaine en 1633.

Les habitants n'abandonnent pas

 
Du moins le village n'a-t-il jamais été complètement abandonné. Les documents nous prouvent que la tuilerie continue à produire (et il en faut des tuiles, pour rebâtir les maisons que les soldats détruisent!); que le moulin, situé à l'emplacement de la Vieille Forge, sur le territoire actuel de Neuves-Maisons, continue à tourner tant bien que mal, même si l'on peine à trouver des fermiers; que les terres sont encore cultivées en blés et en vignes, puisqu'au début de l'année 1638, on se plaint des calamités agricoles, qui ont gâté les récoltes. En 1638 encore, donc en plein cœur de la crise, on voit les religieux de Clairlieu, qui s'étaient égoïstement barricadés dans leur monastère pour échapper à la peste, faire mettre en vente une maison de Chavigny dont le propriétaire est mort: l'avis officiel est affiché  et lu pendant quatre dimanches à la sortie de la messe paroissiale, qui était donc encore célébrée, et neuf témoins différents, habitant le village, ont signé cette publication. Nous pouvons supposer que les habitants, lors des alertes, allaient se réfugier dans les bois et regagnaient leurs demeures une fois le danger passé.

Une vie sociale désorganisée

 
Si les habitants du village ont ainsi supporté avec courage le premier choc de la guerre, c'est qu'ils avaient, peut-on supposer, toutes les raisons de tenir bon. La ville de Nancy, dont la population s'était grossie de nombreux réfugiés, ne pouvait plus se procurer de denrées alimentaires que dans sa périphérie immédiate, par suite de l'insécurité des déplacements. On imagine que les produits agricoles ou le bois de chauffage de Chavigny devaient alors se vendre à prix d'or.

Il y avait de gros bénéfices à faire pour ceux qui restaient. De plus, l'argent qu'ils gagnaient ainsi pouvait leur permettre de racheter à vil prix les maisons et les terres des habitants qui étaient morts ou qui avaient quitté les lieux. Ajoutons encore à cela qu'il n'y avait plus d'impôts à payer, puisque l'administration fiscale avait disparu et qu'on pouvait même profiter de la disparition de beaucoup d'archives pour ne plus rembourser ses dettes. Comme dans toutes les situations de crise, il y a donc eu des victimes et des profiteurs.
 
Dans les années 1640 cependant, la lassitude s'installe, le marasme économique est général et l'occupation française pèse lourdement sur les habitants. La vie sociale est profondément désorganisée.

Par suite du décès d'un assez grand nombre d'habitants ou de leur départ, les survivants se sont trouvés propriétaires de plusieurs maisons. Ils ont évidemment choisi d'abandonner ou de transformer en dépendances agricoles les plus vétustes d'entre elles et de s'établir dans celles qui étaient les mieux situées et les plus confortables.

Il est clair que cette période a été favorable à l'abandon progressif des maisons médiévales du vieux Saint-Blaise, et à l'installation des habitants près du fond de la vallée. D'ailleurs, au cours de cette période de reconstruction de la Lorraine, les terres du bas étaient plus recherchées, car on avait besoin de céréales plus que de vin; la reprise économique favorisait les maisons qui s'installaient près de la route, où le commerce devenait plus actif; enfin, avec le retour de la paix, il n'était plus utile d'habiter comme pendant la guerre à la lisière de la forêt.

La reconstruction

 
C'est donc au cours de la deuxième moitié du XVIIème siècle, lors de la période de "reconstruction", que le centre de gravité du village a basculé vers le bas. Il ne reste plus désormais qu'un petit nombre d'habitations près de la vieille église, tandis que la majorité des maisons forme maintenant une sorte de grappe autour du pressoir, en attendant qu'elles aillent s'aligner le long de la route. La vie sociale retrouve peu à peu sa normalité, avec l'installation d'un vicaire (déjà en 1662, mais il ne deviendra permanent qu'en 1686) et le recrutement d'un maître d'école (mentionné pour la première fois en 1664).

Les institutions municipales recommencent à fonctionner normalement, et à partir de 1661, des listes d'habitants sont régulièrement fournies, ce qui veut dire que l'on dispose à nouveau d'une base pour le paiement des impôts! La main d'œuvre manque, et la plupart des habitants sont des "laboureurs", c'est-à-dire des cultivateurs exploitants pour leur propre compte, avec l'aide de leur famille proche, enfants, frères et sœurs restés célibataires.
C'est à cette époque que s'implantent certaines des vieilles familles qui ont fait souche à Chavigny jusqu'au XXème siècle: les Colin et les Babillon en font partie; mais d'autres familles de laboureurs, comme les Badel, les Mathieu, les Maître d'Hôtel, les Poincelet, les Gaucher, ont quitté le village par la suite, pour aller exploiter d'autres terres ailleurs ou quelquefois vivre de leurs rentes à la ville.

Ces laboureurs étaient en quelque sorte des "entrepreneurs de culture", qui n'hésitaient pas à se déplacer avec leur cheptel et leur matériel, lorsque leurs baux n'étaient pas renouvelés.

La population ne s'est véritablement enracinée que lorsque sont apparus vignerons et artisans, qui souvent appartenaient aux mêmes familles.